Fenningan avait les mains dans les poches, son regard se baladait sur cette rue désormais déserte. Les lampadaires n’aidaient aucunement à le rassurer, il n’était pas vraiment confiant dans le monde Moldu, mais impossible de faire demi-tour. Le jeune homme raccompagnait sa fiancée chez elle, après un repas qui s’était plutôt bien dérouler. Ils ne pouvaient nier que le courant passé entre eux, hélas, il ne s’agissait pas d’une vague d’amour, grande déception pour leurs familles respectives. Les deux jeunes gens avaient discuté de cette situation plus que délicate et étaient arrivés à une conclusion : Se battre. Bien plus facile à dire qu’à faire pour eux, tous les deux en dépendances financières, ils risquaient gros à refuser cette union. Mais lui ne voulait pas se retrouver avec elle, peut-être si les conditions avaient été différentes. Quant à elle, son cœur n’avait jamais cessé de battre pour une autre, pour une morte selon la mère Crowley. Cette vieille lui foutait la chair de poule, il ne comprenait pas comment la jeune femme avait pu lui survivre aussi longtemps.

Les pas se stoppèrent et les regards se croisèrent, accompagnés de sourires hésitants. Finn se pencha légèrement pour déposer un platonique baiser sur sa joue et lui souhaiter une bonne nuit. Elle le gratifia d’un sourire plus méritant avant de disparaître à l’intérieur de son immeuble. Les yeux du jeune homme suivirent les lumières qui s’allumaient au fil de sa progression. Il priait pour elle, espérant qu’il ne lui arriverait de bien grave. Il n’était certes pas amoureux d’elle, mais elle était une femme agréable et pleine d’ambition. Dans un soupir, il tourna les talons et quitta le Londres moldu.


Le taxi se gara et le conducteur vira sa passagère sèchement, se foutant bien de récupérer son argent. Il était furieux contre tous les propos racistes qu’elle avait proférés. Le véhicule se retira dans un crissement de pneus et Fiona couvrit son nez de son magnifique foulard de marque. Ses yeux verts jugèrent la dégaine de l’immeuble avant que ses pieds ne la conduisent à l’intérieur. Son tailleur contrastait avec les vêtements simplets des gens qu’elle croisa dans l’ascenseur. Ce fut à peine si elle leur adressa les formules de politesse. Pourquoi donc prendrait-elle la peine de saluer de telles choses ? Remettant quelques mèches rousses dans son chignon, elle vérifia qu’elle arrivait au bon étage puis quitta la cabine. De silencieuses injures furent prononcées juste après son départ, de quoi lui faire arquer un sourcil mécontent.

Ses talons résonnaient dans le couloir, mais elle n’en avait que faire. Si un malheureux osait se plaindre, elle le ferait taire d’un coup de baguette. Au diable les consignes de sécurité du Ministère, elle avait vécu la grande Guerre, elle avait bien le droit d’imposer son autorité sans se faire emmerder. Ses yeux perçants se posèrent sur la porte de sa fille et dans un soupir hautain, elle ôta un de ses gants de cuir pour appuyer sur la sonnette. Elle put entendre des jurons et un chat miauler, des bruits de clés que l’on secouait et puis… Dieu que sa fille était bien laide ce matin. Ses cheveux étaient emmêlés, ses yeux cernés et son teint blafard. La surprise se lut sur les traits de la fille Crowley. « Maman ?! » Elle soupira. « Tara il va falloir apprendre à prendre soin de toi. Il est hors de question que ton fiancé te voit dans cet état. »

Elle entra sans se faire inviter. « Tu as une sale mine, j’espère que tu n’es pas en train de pleurer la disparation de ta misérable petite-amie. » Son regard se posa sur le visage furieux de sa fille qui semblait sur le point de l’étriper. « Je suis venue te voir pour te remettre sur le droit chemin Tara. J’ai entendu d’être rumeur entre toi et cette Bethany Davis, il va falloir que ça cesse… Tu m’entends ? » Le poing se serra « C’est déjà fait mère. » Et se desserra. « Bien. Nous avons rendez-vous dans une heure pour l’essayage de ta robe de mariée… »

La tasse glissa des mains de Tara et les réflexes de Fiona resurgirent. Un coup de baguette et l’accident fut éviter. Les regards se rencontrèrent et la tension se fit sentir à tel point que Jack se mit à fuir vers la chambre à coucher dans un miaulement contrarié. « Je refuse. » La voix de sa fille avait été ferme, décidée, tout comme son regard furieux. « Tu n’as pas le choix jeune fille. Je te laisse vingt minutes pour te préparer. » La brunette se rapprocha de la mauvaise mère, son visage à quelques centimètres du sien. « Je refuse. »

Et sans rien ajouter, elle s’apprêtait à rejoindre son chat, mais ce n’était point au goût de Fiona. Le temps sembla se figer avant que sa baguette ne se brandisse, projetant Tara dans les airs, la balançant contre les étagères qui se brisèrent sous l’impact. Son cri résonna dans la pièce, de quoi alerter le voisinage. Hélas, tout le monde travaillait déjà à cette heure-ci. Fiona s’approcha lentement de sa fille. Cette dernière tremblait et la peur se lisait désormais dans ses yeux. La baguette était à deux doigts de son front et son cœur cessa de se battre. Jamais sa mère n’avait utilisé la violence pour la faire obéir, il s’agissait d’une première et il y avait quelque chose d’effrayant. Comment pouvait-on être aussi ignoble envers son enfant ? L’ordre muet de sa mère la fit frissonner, mais elle eut le courage de secouer négativement la tête. Un plan se fit promptement dans son crâne et elle ne prit pas le temps de réfléchir au danger.

Ses doigts se saisirent de son arme de bois et sa voix beugla un sort au hasard. Les jambes de sa mère cédèrent sous elle et la brunette se précipita vers l’entrée, se saisissant d’une paire de chaussures et de son manteau, elle quitta l’appartement.


La voiture filait à toute vitesse sur cette petite route de campagne. Tara n’avait jamais eu l’intention de traverser le pays, mais elle souhaitait mettre le plus de distance entre elle et cette folle qui l’avait mise au monde. Ses mains étaient crispées sur le volant et son regard larmoyant sur la route. Il y avait de gros risques d’accidents à conduire de la sorte, pourtant son pied restait sur l’accélérateur et la véhicule traçait sa route sans jamais freiner. La brunette avait besoin de se changer les idées et sa raison refusait de sortir de sa tanière. Peut-être que mourir était la seule solution pour fuir sa mère.

Le soleil la dérangeait désormais et elle fit l’effort d’abaisser la visière pour éviter tout éblouissement. Ce fut à ce moment que la lettre tomba. Cette fameuse lettre qui lui avait envoyé Seònaid. La blonde… Elles ne s’étaient plus parlées depuis des mois, et cela manquait à Tara, mais elle refusait de lui pardonner. La trahison avait été trop douloureuse pour renouer ainsi les liens. Rien n’allait plus dans sa vie, elle s’amusait à fuir tout le monde. Ce petit jeu durait depuis trop longtemps, elle avait perdu la notion de temps…

« Tu as une sale mine, j’espère que tu n’es pas en train de pleurer la disparation de ta misérable petite-amie. »

La réalité la frappe en pleine face et son pied changea de pédale pour faire crisser les pneus. L’odeur de pneu lui donna envie de vomir, mais elle était bien trop focalisée sur cette vérité qu’elle fit abstraction de ce détail. Son cœur battait douloureusement dans sa poitrine tandis que son regard restait accroché à la lettre, à cette adresse qui ne lui disait foutrement rien. Le six juin, comment avait-elle pu ainsi oublier la date ? Il s’agissait de l’anniversaire d’Alexis, ses vingt-huit ans… La douleur était trop forte pour qu’elle puisse rester plus longtemps silencieuse. Son cri de souffrance résonna dans l’habitacle.


La voiture s’arrêta doucement devant une ferme au beau milieu de nulle part. Son regard vérifia une dernière fois l’adresse avant d’observer son apparence. Un coup de baguette et ses cheveux furent coiffer et ses yeux démaquillés. La portière s’ouvrit et Tara quitta le véhicule pour s’approcher de l’habitation. Pourquoi Seònaid l’avait-elle envoyé ici ? Pourquoi tant de mystères ? Ses pas la guidèrent au seuil de la porte et elle hésita à sonner. La curiosité la rongeait, mais en même temps, elle souhait rentrer chez elle pour pleurer sous sa couette.

Elle prit une profonde inspiration et sonna, les mains tremblantes et le cœur souffrant. Les réponses n’allaient pas tarder à arriver et tout irait….

La porte s’ouvrit.
Un visage apparut.
Son Univers vola en éclats.
« Alexis. »

Les souvenirs se déchaînaient dans cet esprit détruit, toutes barrières avaient explosé face à cet impact inattendu. Face à cette porte grande ouverte, tous sentiments et douloureuses pensées s’y engouffraient pour semer le désordre, heureux de pouvoir enfin s’exprimer. Le cœur, quant à lui, avait du mal à se remettre de cette profonde trahison, les battements étaient douloureux et difficiles à garder réguliers, tout comme ce souffle qui s’appauvrissait dans sa poitrine. Ca faisait mal, tout faisait mal.

Elle ne pouvait croire que ce visage se tenait réellement devant elle, ce visage qu’elle avait cherché, pleuré, supplié. Tara avait toujours cru qu’Alexis était morte, il n’y avait pas d’autres raisons de ne plus la voir revenir chez elles, mais ce n’était qu’un mensonge. La femme qu’elle aimait et avait aimé de toute son âme se tenait en face d’elle, sur le seuil de cette maison qu’elle ne connaissait pas. Son esprit lui hurlait de se jeter dans ses bras, mais quelque chose la freinait dans son élan, un mauvais pressentiment.

Tout ceci semblait faux, fade, il devait y avoir un piège qui l’attendait au coin de la rue, il ne pouvait en être autrement. Sa mère avait fait en sorte d’établir de véritables soupçons dans son esprit encore si fragile, à tel point que Tara ne se fiait plus à personne désormais. La vie avait été si injuste depuis quelques années déjà.

Le couteau vint se retourner dans la plaie quand Alexis ouvrit la bouche pour poser ces quelques questions.  Elle voulait tomber à genoux, elle voulait hurler sa peine à s’en casser la voix, la douleur était bien trop forte pour qu’elle puisse la garder indéfiniment en elle de la sorte. Et pourtant, Tara restait droite comme un piquet, son visage restant impassible alors que tout son monde se détruisait, pierre par pierre.

Alexis ne se souvenait plus d’elle. Leur passé n’était plus qu’un éclat de fumée dans un ciel qui se voulait parfait. Tous ces baisers, ces étreintes, ces mots doux, tout ça n’était plus que des cendres qui laissaient un goût amer au fond de sa gorge. Des poings qui frappaient son estomac, des rires qui claquaient à ses oreilles, la voix de sa mère… Déception.

Tara se dégagea d’un coup sec de cette étreinte, elle avait l’impression de s’être brûlée. Son regard chocolat se posa sur cette femme qui avait été autrefois sienne. Comment avait-elle pu l’oublier de la sorte ? Comment avaient-elles pu se perdre sur un chemin si bien tracé ? Ses yeux se détournèrent de ce visage angélique, c’était bien trop douloureux.

"Tu es Tara MacFusty, ma future femme!"

« Je ne suis pas quelqu’un d’important, ne vous en faîtes pas. Je me suis seulement perdue. » Après tout, elle n’avait pas tout à fait tort, elle s’était trompée de chemin. Elle parcourait la route seule désormais, elle n'avait plus rien à faire là.

« Je t’aime Tara. Arrête de faire cette moue ! Je t’aime pour toujours. »

Elle devait empêcher les larmes de couler, elle était plus forte que ça, elle ne devait pas craquer devant elle, jamais. « Je m’excuse du dérangement. »

"Tara, je n'arrive pas à dormir. Je ne veux pas te déranger mais... Tu ne veux pas dormir avec moi?"

Cette sensation qu’elle n’était pas maîtresse de son corps, qu’elle n’était que simple spectatrice de cette scène qui lui meurtrissait le cœur. Alexis la regardait en tant que parfaite inconnue alors que la dernière fois que ce regard s’était posé sur elle, il était brûlant d’un amour qui semblait éternel. Elle se souvenait de ce soir à la galerie, où elle avait attendu pendant des heures son retour, en priant pour s’être trompée. Elle avait joué avec cette bague pendant de longues minutes, répétant son discours en boucle pour ne pas oublier un mot. Et tout cela en vain, la blonde n’était jamais revenue. La bague avait terminé dans le lac près de leur appartement, et le discours crachait contre un mur dans une rage qu’elle n’avait pas pu contrôler.

Le soleil se levait doucement dans le ciel, laissant ses rayons filtrer entre les fins rideaux de la chambre de l'appartement. La soudaine lumière irrita les yeux d’Alexis qui grogna en se tortillant dans tous les sens, remontant la couverture jusque par-dessus sa tête pour être tranquille. La chaleur fut au rendez-vous et un sourire satisfait étira ses lèvres tandis qu’elle se laissait aller dans les bras de Morphée, heureuse de pouvoir s’endormir en toute simplicité. C’était sans prendre en compte la douce caresse qui parcourait le haut de son dos. Un frisson la parcourut et elle couina, cherchant à pouvoir dormir mais une paire de lèvres vint déposer des baisers sur ses épaules et dans le creux de son cou. Elle gigota un peu avant de se tourner, retirant la couette de sa tête pour rencontrer le regard chocolat, celui pétillant d’amusement et d’innocence.

Et cela avait duré des semaines, des mois, une année entière avant qu’elle ne se remette complètement de cette perte. Sa mère avait été là dans les débuts, lui promettant un avenir plus sûr, lui susurrant des mensonges sur celle qui avait volé son cœur. Et Tara l’avait cru, elle avait essayé de la croire pour oublier cette femme, mais c’était se voiler la face. Un fantôme, elle avait été un fantôme pendant une longue et interminable année. Des tonnes de questions avaient été balancées sur la table, elle s’était remise en question, prenant la responsabilité de cette fuite inattendue. Puis elle avait fini par nier cette vérité, ce mensonge. Elle avait toujours été là pour la blonde, jamais elle ne lui avait fait de mal. Elle n’avait rien à se reprocher.

Alexis fit la moue avant de venir lui grimper dessus, la coinçant sous elle, un sourire étirant ses lèvres alors que ses iris océan reflétaient son envie de jouer mais elle restait encore un peu la tête dans le pâté et restait lente. Tara entoura sa taille de ses bras et vint frotter son nez contre le sien. « Bonjour Princesse. » Leur sourire respectif s’agrandit alors que la brune profitait d’avoir une femme toute encore ensommeillée pour se placer à califourchon sur elle. « Bien dormi ? » La blonde prit un air pensif et se redressa sur les coudes, frissonnant sous la morsure du froid. « On est venu me réveiller… » Elle fit une moue boudeuse et sa main vint se poser sur le ventre de sa belle, glissant sous le tissu de son t-shirt, pour caresser sa peau, la faisant frissonner. Elle se mordit la lèvre.

« Oui je suis perdue. » Son regard avait retrouvé celui confus de la blonde, elle n’osait plus utiliser son prénom pour la décrire, ce n’était plus elle. Alexis était morte il fallait croire. Une perte de mémoire. Ses sourcils se froncèrent alors que ses mains se crispèrent dans ses poches, elle n’osait y croire. Pourquoi avait-elle une perte de mémoire ? C’était complètement stupide, était-ce un mensonge pour ne pas affronter la réalité ? Vu l’expression de boucle d’or, elle ne mentait pas. Tara ouvrit la bouche pour la refermer aussitôt. Pourquoi ? Sous la panique, elle mentit. « Pia. Je m’appelle Pia O’Callaghan. »

La brune roula vers le bord du lit et posa le pied à terre, s’étirant doucement, laissant une belle vue à Alexis qui sourit doucement, heureuse de passer des matinées comme celles-ci avec Tara. Deux ans qu’elles avaient emménagé, deux ans de pur bonheur. Une nouvelle moue embêtée se fit voir sur son visage quand sa chérie disparut dans la salle de bain le temps de quelques minutes. Elle lui ordonnerait bien de revenir dans le lit pour pouvoir profiter d’une petite séance de bisous et de câlins flemmards avant qu’elle ne se rendre au boulot. « Alexis.. »

Elle allait ajouter quelque chose, des questions pour en savoir plus sur cette perte de mémoire quand un boulet de canon vint détruire les dernières ruines de son si joli monde. Cette femme qui lui ressemblait étrangement et qui semblait être la nouvelle femme de la blonde. Son cœur se brisa en mille morceaux et sa lèvre inférieure trembla un court instant. Une larme rebelle manqua de couler sur sa joue, mais elle réussit à garder le contrôle. Tara ne quittait pas la nouvelle venue du regard, ignorant celui d’Alexis.

Elle se redressa sur un coude en fronçant les sourcils. C’était quoi ce ton inquiet ? Elle vit Tara revenir, les mains cramponnées sur le ventre, une drôle d’expressions sur le visage. Qu’est-ce qu’il se passait. « J’crois que…» Sa brune s’écroula sur le lit et se tortilla dans tous les sens. Alexis sortit de sous la couverture pour se précipiter vers elle. « TARA ! » Cette dernière se mit à gémir en continuant à trembler, une sorte de grognement s’échappant d’entre ses lèvres. « Tara ! Réponds-moi ! »

« Non, je… » Tim. Le prénom débarqua sans prévenir et ce fut la goutte d’eau qui fit déborder le vase. La larme franchit les dernières barrières pour couler sur sa joue, sa bouche s’entrouvrant pour laisser échapper un cri de douleur muet. Tim, était-ce son enfant ? Celui qu’elles avaient toujours voulu avoir après leur mariage. Elle se souvenait encore de leurs projets, de leurs envies, de leur vie… De leur destin perdu. « Je vais vous laisser. Je suis vraiment désolée du dérangement. Passez une bonne journée. »

Un nouveau grognement se fit entendre et Alexis bascula sur l’arrière-train quand un coup de coude percuta son genou. « GRAAAAAAAAAAAOUH ! » Tara leva les bras en l’air et prit un air féroce en se jetant sur elle avant de tout simplement éclater de rire. « Donne-moi vite mon oscar ! » La blonde soupira et voulut se dégager de son étreinte « C’est pas drôle Tara, j’ai eu… » Une paire de lèvres vint la faire taire et elle ne put s’empêcher d’y répondre tendrement. « Ton humour m’a contaminé. » Tara sourit contre sa peau et l’embrassa avec un peu plus de conviction, sa main se perdant sur l’une des jambes de la blonde qui posa un doigt sur son menton, la forçant à la regarder. « Prions pour que ça ne contamine pas le gosse. »

Et sans laisser le temps à la blonde de la retenir, Tara battit en retraite vers sa voiture, les larmes se déversant sur son visage fatigué et détruit. Sa main se posa sur la portière et elle s’accorda un dernier regard vers cette ferme. « Joyeux Anniversaire. » Et elle disparut, seule, sur cette route.

La voiture se gara dans un crissement de pneus et Tara sortit de là en claquant la portière. La maison de sa mère se tenait devant elle, elle était déterminée à lui foutre la raclée de sa vie. La brunette venait de vivre l’instant le plus douloureux de sa vie. Retrouver la femme qui avait partagé les plus belles années de son existence pour ensuite la savoir en couple avec une autre, un gosse sous le bras en plus de ça.

Ses doigts se refermèrent sur sa baguette alors qu’elle ordonnait au majordome de la laisser entrer, ce qu’il fit sous la menace de sa magie crépitante. Ses pas se faisaient furieux contre le parquet, sa main ouvrant violemment les portes pour trouver cette garce qui avait osé la mettre au monde. Les larmes de rage coulaient toujours sur ses joues quand elle finit par défoncer le passage qui menait au bureau de Fiona.

Cette dernière leva les yeux vers celle qui était sa fille et arqua un sourcil désapprobateur. « J’espère que tu viens présenter tes excuses, ta lettre d’héritage est prête à être balancée dans le feu de cheminée de ce soir. » Le bureau vola et la femme se leva en fronçant les sourcils. « Tara Crowley je vais… » Une baguette se posa contre sa gorge. « FERME LA ! TU VAS LA FERMER ! » Pour la première fois de sa vie, Fiona Crowley avait peur de sa fille. Elle pouvait voir cette flamme de rage brûler dans le regard haineux de sa fille. Elle était déterminée et son corps ne tremblait pas de peur.

« J’ai revu Alexis aujourd’hui. » La mère se figea et son souffle se bloqua dans sa poitrine. Comment était-ce possible. « Tu délires Tara. » La baguette s’enfonça un peu plus dans la peau, la faisant taire sur le champ. « Elle a une femme et un gosse. Elle ne se souvient plus de moi, de nous ! Qu’est-ce que t’as foutu ? Ne fais pas l’innocente ! Je sais reconnaître un sort ! Qu’est-ce que tu as fait à ma femme ?! »

Les larmes coulaient abandonnement sur ce visage meurtri par la douleur et la rage. Tara était à un bout. Cette dernière finit par tomber à genoux, ne pouvant plus supporter une pression aussi grande. Ses épaules s’affaissèrent alors qu’elle se laissait aller au désespoir. « Qu’est-ce que tu as fait d’Alexis… Qu’est-ce que tu lui as fait ? »

Fiona se tenait sur le bord de la route, son visage était dissimulé sous la capuche de sa cape. Son regard était focalisé sur le chemin mal éclairé. Cette route qui traversait la forêt, cette forêt qu’elle connaissait si bien. Son oreille était attentive à tout bruit de moteur alors qu’elle resserrait sa prise sur sa baguette. Ce fut à cet instant qu’elle reconnut la voiture de celle qui avait perverti sa fille. Sans hésiter, elle enjamba la clôture et se planta sur le macadam. La conductrice était trop désorientée pour se rendre compte de ce qu’il se passait et Fiona se contenta d’incanter un sort de bouclier pour faire valdinguer la voiture contre un tronc. Le choc fut brutal et elle aperçut une silhouette sur le capot. Un sourire satisfait étira ses lèvres avant de mourir. Un grognement lui parvenait. Elle n’était pas morte.

Elle s’en approcha doucement, sa baguette pointait vers la silhouette blessée. Elle pouvait entendre des murmures d’appels au secours. Du bout des doigts, elle inclina le visage ensanglanté dans sa direction. Le regard bleu rencontra l’émeraude terrifiante de la mère. Elle voulut lui dire quelque chose mais un éclat de magie éclaira la nuit et un voile passa devant ses yeux. Les souvenirs de Tara, des trois années furent effacés de son esprit. Le rire de la femme qu’elle aimait, son sourire, sa présence, tout ça fut parti en fumée en quelques secondes. Et la silhouette, toute de noire, vêtue fut avalée par la nuit.

Fiona s’accroupit face à sa fille et prit son visage dans ses mains. « Tu te fais des idées. Jamais je n’aurais fait ça… » Elle lui remit une mèche de cheveux derrière l’oreille. « Alexis a seulement refait sa vie sans toi… Tu n’as jamais été qu’un jeu. »

Fiona suivait sa fille à la trace alors que celle-ci parcourait les couloirs de Ste Mangouste à toute vitesse. Elle criait le nom de celle qu’elle aimait, se fichant bien des infirmières qui lui intimaient de se taire. Elle était inconsolable, incontrôlable.

Fiona finit par la prendre dans ses bras. « Elle n’est pas là Tara. Je suis désolée mais Alexis n’est pas là. » Elle pouvait sentir les sanglots de sa fille contre sa poitrine et resserra sa prise autour d’elle. La blonde ne leur causerait plus de problèmes,  Tara allait avoir une meilleure vie, un meilleur avenir, plus rien ne se mettrait en travers de sa route.

Elle se détacha d’elle pour la laisser quitter l’hôpital. Une fois sûre qu’elle n’était plus là, elle écarta les rideaux d’une des chambres pour apercevoir la crinière blonde celle qui avait faire échouer ses plans.

La silhouette de Tara se découpait dans la rue mal éclairée de sa rue. Son visage était caché par sa crinière brune alors que les larmes s’écrasaient une par une sur le sol trempé par la pluie. Ses mains étaient salies, blessées par les murs qu’elle avait frappé à la recherche de réponses, une bouteille d’alcool pendait mollement à ses doigts. Les rires d’un enfant inconnu la meurtrissaient, tout comme les images de ce couple amoureux qui s’embrassaient sur le pas de la porte.

Elle avait tout perdu.