"Ce n'est pas le fait d'être aimé par quelqu'un qui guérit notre guerre civile intérieure, c'est d'être aimé par soi-même, de s'accepter, de la racine à la cime."
Lundi 1er octobre 2018
Le bureau du professeur Cadeyrn lui était désormais presque entièrement dédié. Le gamin pouvait y aller quand il voulait et y rester le temps qu'il désirait. Dans les limites du réglement scolaire évidemment. Et malgré un mois ''d'entraînement'' intensif, il n'était arrivé à rien. Rien de concret. Mais son professeur particulier lui disait de ne rien lâcher alors il ne lâchait rien.
Ce matin là, il avait dû se lever plus tôt malgré son absence de cours avant 10h car il avait rendez-vous avec Friedhart. Quelle idée de mettre ces rendez-vous des lundi matins. C'était fait pour dormir...mais bon. C'est pas comme s'il avait le choix. L'avait t-il seulement des fois ?
Such a lonely day And it's mine The most loneliest day of my life
Non.
Such a lonely day Should be banned It's a day that I can't stand
Il n'en avait pas l'impression. Lui qui faisait des efforts de politesse voire même d' obséquiosité, ne recevait que des lettres formelles de ses parents. Et plus aucune lettre de Klaus. A croire que les tensions des vacances se cristallisaient. Mais il s'en fichait. Complétement. Tant que Ludwig lui écrivait récemment tout allait bien.
Son frère lui avait d'ailleurs envoyé un vieil ouvrage américain sur les magies amérindiennes. A priori, certains n'utiliseraient pas de baguette ce qui se rapprocherait peut-être de son problème. Mais bon pour l'instant les premiers chapitres parlaient surtout d'herboristerie, de potionlogie et de divination... C'était certes très intéressants (et ses points en botaniques et potions s'en ressentaient, c'était les seuls qui ne chutaient pas) mais il ne se sentait pas vraiment concerné. Cela ne lui parlait pas. Mais bon, l'intention était plus que louable. Il en avait d'ailleurs pris quelques notes éparses, bien plus soignées que ses cacographies d'Histoire de la Magie (c'est ainsi que le professeur avait appellé son dernier devoir).
Mais qui aurait fait mieux en dormant aussi peu ? Plus qu'insomniaque, le garçon devenait noctivague. Le soir, toutes ses pensées se tournaient vers l'absence de son ami. Il imaginait alors des scénarios capillotractés pour justifier celle-ci. Dans certains, Alek était devenu un sorcier très puissant qui ne méritait pas de suivre les cours à Poudlard, ceux-ci ne pouvant pas lui suffire, son parcours se devait d'aller dans une école de magie le magnifiant. Dans d'autres, plus souvent lors de cauchemars, il avait rejoint le pays des anges et son auréole semblait encore parfois étinceler à son réveil.
The most loneliest day of my life The most loneliest day of my life
Ces jours là, il en pleurait.
Such a lonely day Shouldn't exist It's a day that I'll never miss
Ce lundi était un jour là.
Such a lonely day And it's mine The most loneliest day of my life
Il avait débarqué avec des cernes immenses face à son psychologue et l'on pouvait encore lire une profonde tristesse dans son regard. La colère avait pris le pas. Fortement. Plus fortement que jamais. La séance avait due être brusquement être interrompue quand un des rideau de la pièce s'était enflammé.
Il avait même pu s'absenter du cours de potions. Alors il était ici. Dans le bureau de Cadeyrn.
C'est étrange comme c'était devenu son nouveau refuge. Plus besoin du terrain de quidditch. Ici, il se sentait en sécurité. Ici, il avait le champ libre.
Le champ libre à quoi ? Au désespoir ? A l'ignorance ?
Cela était absurde.
Absurde !
Le gamin attrapa un des vases vide dans la bibliothèque et le fracassa sur le sol. Les larmes commençaient à lui monter.
Mais Alek n'était toujours pas là.
And if you go, I wanna go with you And if you die, I wanna die with you Take your hand and walk away
Un second vase suivi.
The most loneliest day of my life The most loneliest day of my life The most loneliest day of my life Life
Pas là. Il n'était pas là.
Mais il lui restait Zacharias.
Such a lonely day And it's mine It's a day that I'm glad I survived
Sa main s'immobilisa, vase en main.
Ludwig.
Il redéposa ce dernier, l'air un peu hagard devant les bris de verre.
Miles & Desmond.
Ces petits êtres fragiles mais sachant toujours être présents pour lui. Samuel.
Qui malgré sa jalousie, se montrait de moins en moins insupportable.
Mia.
Dont il avait remarqué les efforts pour gagner son amitié.
Robbie.
Qu'il adorait désormais taquiner.
Rose.
Eliott.
Philip. Molly. Absolan. Effy. Lucas. James. Albus. Lily. Louis & Fred. Dominique. Nicholas. Tous ceux de la chorale. Puis les profs, ces profs qui l'avait laissé atteindre la deuxième année quand même lui n'y croyait plus.
Il y avait tout ceux qui étaient restés Et qui brisaient cette absence Il y avait tout ceux qui l'avait écouté Et lui avait pardonné ses mauvaises expériences
Ils étaient là, toujours là Soudés en confrérie Des grands, des petits, ici bas Avec qui continuait la vie
Il aurait put tout lâcher Comme ces centaines de débris Qui au sol s'étaient dispersés Comme des étoiles dans la nuit
Mais il devait se raccrocher Coller les morceaux Aller de l'avant et avancer Sortir la tête de l'eau
Mais comment faire Comment faire pour recoller Ce qui brisé dans la mer Se projette sur les rochers ?
Il ne sait pas comment réparer A genoux, il observe les dégâts Les mains tendues il voudrait y arriver Mais sans y croire il ne pourra pas
C'est ainsi que Niklaus se retrouva à genoux face aux débris épars des pauvres vases. Il devait se souvenir de ce que Cadeyrn lui avait dit. Se concentrer. Fermer les yeux. Imaginer les vases entiers.
Mais il n'y arrivait pas.
Il n'y arrivait juste pas.
Peut-être simplement, fallait t-il plus de temps pour recoller les morceaux ?
En attendant, il ne pouvait certainement pas laisser le bureau dans cet état. Il ne tenait pas à ce que le professeur se blesse. Ce dernier se promenait toujours pieds nus et il suffirait de pas grand chose pour qu'il s'écorche. Ce n'était pas l'intention du gryffondor. Mais comment nettoyer ? Certainement pas avec ses mains. De plus, il ne voyait pas de balais ici. Il devrait demander aux elfes de maison mais il ne savait vraiment pas où les trouver.
Le seul moyen qu'il voyait c'était d'essayer de se concentrer et de pousser ces bris de verres sur une feuille de papier.
Allongé sur le sol, bras tendus vers la zone sinistrée, le jeune gryffondor fronça les sourcils très fort. Il se concentra et...
Rien ne se passa.
Bon ça marchait peut-être en bougeant les mains ? Ouais mais comment ? BAM en avant !
Toujours rien.
Hum faire comme si des ficelles les maintenait ?
Toujours rien.
Debout au dessus et des gestes en tournoyant pour regrouper le tout ?
Toujours rien.
Etait t-il vraiment censé réussir ?
Soupir.
Personne ne pouvait lui dire exactement ce qu'il était censé faire ? Ce serait pas noté dans un de ces bouquins ? Genre magie avancée de l'air ? Non ça existait pas ce bouquin ?
Visage penché, Niklaus se perdit dans la lecture des différents titres. Trouvant un ouvrage semblant pouvoir l'aider, il attrapa la chaise du bureau du professeur et la posa parmi les bris de verre. Valait mieux ne pas tomber. Le livre était haut. Le gamin dû jouer à l'acrobate sur le dossier de la chaise pour l'atteindre. Il y était presque, ses doigts frôlaient la tranche du livre. Encore un peu. Juste un tout petit peu.
Clac.
Secousse brusque et soudaine.
L'équilibre bancal venait d'être rompu.
Un cri de surprise. Ses mains se rassemblent, opposées avant de se rejeter comme deux aimants de même polarité.
Le temps semble suspendu.
Il connait cette sensation.
Il est là, suspendu à quelques petits centimètres du sol.
Et soudain tout s'accélère et c'est le choc. Moins rude qu'il aurait dû mais rude quand même.
Certains morceaux de verre vienne se planter dans ses bras moins protégés que le reste de son corps. Il crie encore mais de douleur cette fois-ci.
Non mais quel idiot.
Franchement.
Néanmoins, un léger sourire venait de naître sur ses lèvres.
Il avait adoré cette sensation. Celle d'être suspendu. Il était certes désormais complètement épuisé mais il avait réussi quelque chose.
Là, au milieu des bris de verre, le petit gryffondor éclata d'un rire soulagé et amusé. La scène était surréaliste mais c'était ainsi. Il savait. Il savait qu'il pouvait le faire. Il pouvait apprendre. Il avait réussi à léviter ! Il savait pas comment. Vraiment pas. Mais c'était classe !
Il n'aurait plus qu'à essayer de se jeter dans le lac ! (Il aurait pu penser à se jeter d'une tour mais il était un gryffondor et pas un suicidaire). En plein hiver ça pourrait faire son effet non ? Réussir ou finir frigorifié avec 40° à l'infirmerie.
En attendant il s'imaginait se la péter devant la confrérie. Du genre il savait pas lancer de Lumos ok mais il savait léviter !
Enfin en attendant là, la douleur le rappela à la douce réalité. Se relevant en grimaçant, le gryffondor essaya d'enlever les plus gros des morceaux de verres mais il ne le pouvait pas. Il avait du courage mais pas à ce point là. En plus il se sentait faible. C'était normal que tout tournait comme lorsqu'il prenait de la poudre de cheminette ? Et puis qu'était donc cette ombre soudaine ? Ce flou ? Ce noir ?
Le vide.
Son sommeil est loin d'être un sommeil sans rêve. Alek comme à son habitude est présent. Il a les traits déformés, des coups au visage et il lui crie dessus que tout ça c'est de sa faute. C'est de sa faute. Il n'aurait pas dû lui écrire. Jamais. C'était un sale sang mêlé qui ne comprenait rien à la pureté du sang ! Il ne comprendrait jamais rien !
Changement de décors.
Ludwig est là, un masque de mangemort en main et il à la marque, la marque des ténèbres sur son bras. Serrant Niklaus contre lui, il lui chuchote de se joindre à lui. Que les nés-moldus polluent le spectre magique. Que c'est à cause de tels mélanges que lui est presque un cracmol. Si les gens ne se mélangerait pas, la magie ne serait volée à personne.
Devant lui, il y a la confrérie entière et Poudlard tout entier. Timide et apeuré, le jeune Dubois se rapproche du Choixpeau. Ce dernier ricane une fois sur sa tête.
« Mais tu es un MOLDU .... Moldu moldu ! » Et de toute l'école reprendre en cœur. « MOLDU MOLDU MOLDU ! » Même Zacharias est plié en deux de rire alors qu'il hurle plus fort que les autres « MOLDU MOLDU MOLDU MOLDU ! »
Ulricht lui hurle qu'il fait honte aux Dubois, qu'il n'a plus rien à faire chez eux. On ne veut pas d'un moldu. Il a été adopté. Il n'a pas sa place à Poudlard. Il peut retourner chez lui. Il ne maîtrisera jamais la magie. Il n'en a pas en lui.
Cette fois ci c'est le professeur Londubat qui lui explique. Il ne sera jamais un sorcier. On lui a volé sa magie car il est trop faible et ne la mérite pas. A la place c'est Charlie, la grande préfète qui lui avait tant fait de remarque qui utilise ses pouvoirs. Elle, elle est méritante. Elle est grande, elle est puissante et obéissante. Alors en punition, lui était privé de magie.
Et au professeur de partir en rire machiavélique.
Il se réveille en hurlant.
Une main éponge la sueur dégoulinant de son visage. Une ombre connue, un sourire rassurant. Mais pas suffisamment.
Fébrile et tremblant comme une feuille, le jeune Dubois observe les alentours. L'infirmerie. Des sucreries trônent déjà sur le côté de son lit ainsi que des mots de ses amis.
Ce n'était qu'un cauchemar.
Un horrible cauchemar.
Il était un sorcier. Il était le fils d'Olivier Dubois. Il était le gardien des gryffondors. Il n'était ni un moldu ni un cracmol. Sa magie était juste différente. Indomptable comme lui. Libre comme l'air. Apaisante comme l'eau. Imprévisible comme le feu. Profonde comme la terre. Tout ça à la fois. La magie c'était lui. Et il était la magie. A jamais.